Obésité, course à pied et périostite tibiale
- Loïc Guyot-Messier
- 24 août 2024
- 5 min de lecture
J’ai un grand chum qui consulte pour une douleur au tibia droit. Il m’a dit qu’il a recommencé à courir ce printemps parce qu’il veut se remettre en forme. Cet hiver, il a un peu laissé aller les choses et a pris environ 20 livres. Bref, on a diagnostiqué une périostite à droite. Mais il y a un commentaire qui ne m’a pas plu : il a dit, « Mon poids ne doit pas aider, ça doit être pour ça que j’ai mal à droite. » NON. Pas du tout. Ça m’écœure d’entendre ça parce que : dis-toi que tu déplaces une masse quand tu cours, que ce soit sur ton pied droit ou ton pied gauche. Donc, si le poids que tu mets à droite est censé ne pas t’aider, il ne devrait pas t’aider à gauche non plus. Mais, pourquoi n’as-tu mal qu’au tibia droit? Logiquement, si c’était simplement une question de poids, tu aurais aussi de la douleur à gauche. Pour moi, cela signifie que ton poids n’a aucun rapport avec ta douleur. Tu n’as même pas à te sentir mal à ce sujet. Ce que ça me dit, c’est qu’il y a quelque chose d’asymétrique qui se passe à droite par rapport à ce qui se passe à gauche. Effectivement, au niveau de son pied droit, il y a un affaissement de la voûte plantaire et deux petits os qui fonctionnent moins bien ensemble. Nous avons renforcé certains muscles, et maintenant, ça va bien. Il continue à perdre du poids et à courir.
Qu’est-ce qu’une périostite?
La périostite est une inflammation d’une fine membrane recouvrant les os que l’on nomme le périoste. Théoriquement, la périostite est possible sur tous les ors du corps. Cependant, la majorité du temps, une périostite se développe chez un.e coureur. se et elle se situe sur le tibia. Il peut y avoir une périostite sur la crête antérieure ou postérieure du tibia.
Comment se produit une périostite?
La cause de l’inflammation du périoste est souvent reliée à des mouvements répétitifs qui amène un muscle à se frotter sur l’os. La course à pied étant un sport très répétitif, cela explique pourquoi nous le voyons régulièrement chez ces adeptes. Dans le cas d’une périostite tibiale antérieure (sur la crête antérieure du tibia) ce sera le muscle tibial antérieur alors que dans le cas d’une périostite postérieure (sur la crête postérieure du tibia) ce sera le muscle tibial postérieure, muscle long fléchisseur de l’hallux et le muscle long fléchisseur des orteils qui en seront la cause.
Est-ce que mon poids peut avoir un réel impact sur une douleur ou une blessure?
La réponse est oui et non. Je m’explique. Non parce que même si la douleur était aussi intense du côté droit que du côté gauche, cela nous signale davantage une mauvaise quantification du stress mécanique que nous infligeons à notre corps. Le stress mécanique étant la pratique d’un sport ou d’une activité qui inflige un stress physique à notre corps. Les différents paramètres qui influencent ce stress est le type d’activité, l’intensité d’activité et la durée de l’activité. Pour donner quelques exemples, le stress sera beaucoup plus grand sur les tibias de quelqu’un qui pratique la course à pied comparativement à quelqu’un qui fait de la natation (type d’activité). Ce stress sera également plus grand chez quelqu’un qui sprint 100m que quelqu’un qui marche 100m (intensité de l’activité). Dernier exemple, le stress sera plus grand chez quelqu’un qui parcourt 10km à la course que s’il avait parcouru 1km au même rythme (durée de l’activité). L’humain est une machine d’adaptation et il a besoin de repousser graduellement ses limites. Courir 20km alors que cela fait 5 ans que nous n’avons pas couru une seule fois, il faut s’attendre à avoir des douleurs ou même potentiellement se blesser parce que notre corps n’est plus adapté. Cela est tout aussi vrai que l’on pèse 120lbs ou bien 350lbs. Oui parce que la limite maximale à encaisser un stress mécanique peut être influencée par le poids de la personne. Pour donner un exemple avec des chiffres fictifs, la personne qui n’a jamais couru de sa vie faisant 120lbs aura peut-être une limite maximale d’adaptation qui se situe à 5km. Alors que la personne de 350lbs qui n’a elle non plus jamais couru de sa vie aura peut-être une limite maximale d’adaptation se situant à 1km sachant qu’elle court au même rythme que la plus petite personne.
Qu’est-ce qui explique qu’une arche plantaire affaissée puisse provoquer une périostite?
Partons dans l’idée que la limite maximale d’adaptation est égale entre la droite et la gauche. Il se peut qu’avec nos expériences de vie (traumatismes et blessures du passé) nous accumulons des asymétries qui déforment un peu notre système. Cela influence notre capacité maximale d’adaptation négativement. Notre corps n’est plus aussi bien adapté parce qu’il y a une modification dans son système d’absorption de l’énergie. L’énergie de chaque foulée étant moins bien dispersée, elle se concentre à un endroit et occasionne plus de stress amenant à des douleurs ou une blessure. La musculature doit donc travailler plus fort et créer une irritation sur le périoste. Ainsi pour illustrer par des chiffres, la capacité maximale d’adaptation pour le pied avec une arche plantaire affaissée est peut-être de 3km alors qu’elle est de 5km de course à pied pour le côté sain. Il faut bien comprendre également qu’une arche plantaire n’est pas toujours un mauvais signe. Ce sont les asymétries qui nous suggèrent qu’il se passe quelque chose d’anormale. Quelqu’un avec les deux pieds plats qui ne présente aucune douleur ou inconfort est totalement normal et nous ne voulons pas modifier cela. Les pieds plats sont sa structure naturelle et il est adapté comme cela. Si on tente de modifier ses arches plantaires, il ne sera alors plus adapté et sera plus à risque de blessure avec une arche plantaire voutée.
Le plan de traitement
Exercices initiaux
Renforcement de fléchisseurs des orteils avec une serviette au sol 10x la longueur de la serviette
Renforcement de l’inversion de la cheville avec l’élastique 3 séries de 10 répétitions
L'intensité et la spécificité des exercices ont progressés au fur et à mesure qu'il gagnait en force et en mobilité.
Modalités antalgiques
Taping papillon LeukoK sur site de la périostite.
Meilleure gestion du stress mécanique reliée à la course à pied avec un nouveau programme de course à pied avec une progression plus lente.
Thérapie manuelle orthopédique
Glissement latérale du calcanéum droit à l’articulation sous-talaire antérieure utilisant des pressions oscillatoires de grade IV d’une durée de 30 secondes 2 fois. (Gliss lat ss-talaire ant D Gr IV 2x30sec)
Mobilisation du naviculaire droit en glissement dorsale grade IV d’une durée de 30 secondes 2 fois (Gliss nav dorsal D Gr IV 2x30sec)
Technique de tissus mous
Massage muscle tibial postérieur D
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